Études en communication : aspects épistémologiques, méthodologiques et critiques | Louis-Claude
Paquin, UQÀM |
La naissance de la tragédie
première édition de 1872
Le titre de la première édition de 1872 est La Naissance de la tragédie à partir de l'esprit de la musique. Nietzsche a 28 ans. Le frontispice comporte une vignette représentant Prométhée délivré de ses chaînes.
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Comporte une préface à Richard Wagner.
« [...] je déclare que, d'après ma conviction profonde, l'art est la tâche la plus haute et l'activité essentiellement métaphysique de cette vie, selon la pensée de l'homme à qui je veux que cet ouvrage soit dédié, comme à mon noble compagnon d'armes et précurseur dans cette voie. »
deuxième édition de 1886
trois ans après la mort de Richard Wagner
plus de dix ans après sa rupture avec lui
nouveau titre : La Naissance de la tragédie, ou Hellénité et pessimisme. Nouvelle édition avec un essai d'autocritique.
style
livre fort peu universitaire
pourtant sa thèse de philologie
relativement court, malgré l'ampleur des thèmes traités
sans notes
écrit dans un style flamboyant et par endroits polémique.
méthode
soupçonne le discours philosophique d’impuissance
entrevoit une autre forme de pensée
intermédiaire entre le travail d’historien d’une civilisation et l’interprétation littéraire des signes de cette civilisation
recherche de l’origine: la généalogie
mise à jour d’une vérité enfouie
pour en retrouver la vitalité première, étouffée par l’érudition universitaire
apologie de l’héroïsme des premiers grecs
qui regardent l’abîme de l’existence en face
qui acceptent la nécessité de l’expérience de l’effroi et de l’erreur
qui vivent dans le courage suprême de la lucidité
invoque les noms des divinités pour penser
certains phénomènes qui échappent par leur nature à la clôture de la raison et du concept
la fécondité de l’art
thématique
Apollon et Dionysos sont deux principes cosmologiques et anthropologiques qui entrent en contradiction.
appel à une renaissance culturelle du monde allemand.
profession de foi « néo-païenne ».
préfigure le «Gott ist tot» Dieu est mort
l'art
comme la seule justification de l'existence et du monde
un stimulant qui donne la force d'affronter et d'assumer le devenir source de souffrance
supporter la vie en l’esthétisant
- > recherche d'une transmutation de la souffrance en plaisir esthétique
la tragédie grecque
« synthèse des arts » (poésie, musique, arts plastiques)
l'opéra
« l'œuvre d'art totale » de l'avenir, dont Wagner a donné le modèle avec Tristan :
« L'homme n'est plus artiste, il est devenu œuvre d'art : ce qui se révèle ici dans le tressaillement de l'ivresse, c'est, en vue de la suprême volupté et de l'apaisement de l'Un originaire, la puissance artiste de la nature tout entière. »
critique
l'hypothèse d'un lien originaire entre le culte de Dionysos et la naissance de la tragédie attique
présentée comme une évidence indiscutable
mais fragile, ne résiste pas à la critique historique et philologique.
idée que l'art et la littérature naissent du culte religieux
n'a rien perdu de sa force de conviction et de séduction.
réinterprète la théorie aristotélicienne de la catharsis (purgation des passions)
précède Freud en dévoilant la dimension psychosomatique de l'effet produit par le « drame musical grec » sur ses spectateurs
Freud déniera qu'il a lu Nietzsche (Michel Onfray)
texte politique autant qu'un manifeste esthétique et métaphysique
on y trouve la vision d'un État fondé sur une communauté d'individus d'élite, héroïques, prométhéens et artistes
déroute les philologues et ruine sa réputation universitaire
Willamovitz et Moellendorf dénonçèrent les erreurs chronologiques, les conjectures aventureuses, les extrapolations, les partialités.
ils lui reprochèrent aussi de mêler à la science l’appel politique ou éthique.
longtemps négligé par les philosophes
redécouvert depuis les années 1930
Jacques Le Rider, Nietzsche en France de la fin du XIXe siècle au temps présent, PUF, 1999, 296 p.
par Georges Bataille et Martin Heidegger
est désormais considéré comme le premier grand chef-d'œuvre de Nietzsche.
aboutissement et retournement d'une tradition spécifiquement allemande de la Bildung (culture, éducation) néo-humaniste grécisante d'inspiration platonicienne,
marque la naissance de la modernité.
analyse et commentaire de Jacques Darriulat mise en ligne le 29 octobre 2007
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